Homélie pour le temps de l’Avent (B)

Veiller pour lui, avec lui!

« Prenez garde, restez éveillés, car vous ne savez pas quand ce sera le moment. »

Quand j’étais enfant, disons vers l’âge de 4, 5 ou 6 ans, j’acceptais mal de devoiraller me coucher tôt dans la soirée, bien avant les autres, plus grands, qui eux avaient le droit de veiller, de prolonger la journée en conversations, lectures, écoute de la radio ou sortie à l’extérieur. Que les plus petits aillent au lit plus tôt, cela faisait l’affaire de tout le monde, bien sûr ! 

En nous disant de veiller, le Seigneur ne veut pas réglementer nos temps de sommeil, ni les abréger ni les allonger. Il nous demande plutôt de garder la forme pour être davantage présent quand ce sera le temps, le moment, comme il dit. Le Seigneur ne veut pas non plus, je pense, nous faire peur en nous disant qu’il faut être sur le qui-vive, au cas où la fin du monde viendrait soudainement. Il ne joue pas à nous surprendre. Pourquoi arriverait-il comme ça, sans crier gare, pour l’heure du jugement. Il serait surprenant que Jésus veuille nous faire peur, ajouter du stress à nos vies déjà tourmentées? Pas plus qu’il ne veut nous endormir, il ne veut nous énerver.

« Veillez donc! car vous ne savez pas quand vient le maître de la maison. » Pourqui allons-nous veiller, sinon pour lui? Pour être là, disponible au besoin, quand il viendra. Veiller pour lui, cela veut dire veiller avec lui. Pour faire ce qu’il attend de nous. Ce sera nous occuper d’abord de ce qui fait notre labeur de tous les jours. C’est là que le Seigneur se fait attendre. C’est lui qui décide de l’heure où il vient. Mais il y a des probabilités. Le Seigneur nous en donne une petite idée quand il nous dit : « le soir ou à minuit, au chant du coq ou le matin. » Ces repères temporels ne sont pas innocents. Ils ne sont pas sans signification. Le Seigneur pointe ainsi des moments sensibles, où il se présente à nous, où il nous attend peut-être, où il a besoin de nous. Serons-nous prêts à relever le défi? Serons-nous disposés à reprendre du service?

Il viendra peut-être le soir : au moment de son dernier repas, à la sainte cène, au soir d’une plus grande intimité? Où il nous lave d’abord les pieds. Où il se donne en communion d’amour et de vie, alors même que l’un de nous va le trahir et le livrer. 

Il viendra peut-être à minuit : au rendez-vous de Gethsémani, où le Seigneur est en prière et nous convoque avec les trois disciples à prier avec lui. Veiller dans la prière, ce n’est pas toujours facile. Que de distractions et de somnolences parfois! Or, prier ce n‘est pas seulement notre affaire. C’est bien plus lui qui prie en nous. Il prie avec nous. Elle est si précieuse pour lui et pour nous cette communion de cœur et d’esprit! C’est un moment de grâce!

Peut-être qu’il viendra au chant du coq? Nous nous souvenons parfaitement de ce moment douloureux où, après son arrestation dans le jardin, Jésus fut emmené en ville quelque part pour y être mis sous bonne garde, brutalement, comme on fait pour un prisonnier. Simon Pierre avait suivi le cortège. Tristement il a craqué; il n’a pas tenu le coup. Allant jusqu’à renier son maître devant une petite servante, un simple serviteur. « Avant que le coq chante tu m’auras renié 3 fois » avait prédit Jésus. Qu’en est-il pour nous de ce momentum où nous sommes mis au défi de nous prononcer pour le Seigneur, de professer ouvertement notre foi, notre attachement à sa personne, notre appartenance au Christ? 

Il viendra peut-être le matin? Chaque matin, quand vient le jour, c’est le moment où s’engage la comparution du Seigneur devant le Sanhédrin, les Grands-Prêtres, puis le Gouverneur. C’est le moment de notre comparution en son Nom, alors que chaque jour nous subissons l’épreuve de notre fidélité, de notre amitié pour lui. C’est l’heure du témoignage de notre engagement et notre service pour lui dans ses pauvres, ses petits, tous ses bien-aimés, les blessés de la vie. 

Nous sommes maintenant dans la saison, où mille petits moments nous sont donnés pour faire nos preuves, pour y vivre l’épreuve de notre défense. Car nous sommes mis en accusation avec lui., à cause de lui. La croix se profile toujours un peu sur notre quotidien. Là encore il ne faut pas qu’il nous trouve endormis, absents, sans foi ni espérance, sans amour. Plus que jamais c’est le moment béni où il vient pournotre relèvement, et bientôt peut-être pour l’heure de la Résurrection. Que vienne le matin du grand réveil qu’il nous prépare. Il en fera pour tous ses élus une Fête éternelle.

Fr Jacques Marcotte, OP

Québec, QC

Laissez un commentaire