Elles étaient trois nous rapporte l’évangéliste Luc. Trois femmes dont l’histoire a retenu le nom : Marie de Magdala, Jeanne, et Marie, la mère de l’apôtre Jacques. Elles étaient trois à l’aube de ce matin qui ressemblait à tous les autres matins, dans la ville sainte ensommeillée. Trois ombres craintives, accablées par la mort de celui qu’elles avaient suivi jusqu’au Calvaire. Mais surtout trois femmes déconcertées par la disparition du corps de celui qu’elles venaient voir une dernière fois afin de l’embaumer.
En soumettant ces faits au jugement de l’histoire ou à l’enquête judiciaire, une conclusion s’impose d’elle-même : le corps ne fut jamais retrouvé, il fut sans doute enlevé par ses partisans. Le dossier est clos ! Pourtant, la suite de l’histoire a de quoi étonner et c’est sans doute ce qui permet d’affirmer que nous sommes devant la disparition la plus spectaculaire de tous les temps.
Alors que Jérusalem cherchait à oublier les événements de la veille, et qui pourtant marqueront à jamais sa destinée; alors que les Apôtres eux-mêmes croyaient que ces femmes radotaient, un constat s’impose : la nouvelle incroyable se répandra avec la vitesse de l’éclair et, bientôt, elle embrasera tout le bassin de la Méditerranée. Il n’y a plus place ici pour l’observateur impartial, le journaliste ou l’historien. De ce matin semblable à tous les autres matins, jaillit l’extraordinaire nouvelle du matin de Pâques.
Pourtant, l’expérience du tombeau vide n’explique en rien la foi des disciples du Christ. Ce serait là un bien faible appui sur lequel miser sa vie. L’événement est d’un autre ordre. Le tombeau vide n’est qu’un signe avant-coureur qui prépare les Apôtres à une rencontre avec le Ressuscité où la foi seule est sollicitée. La résurrection du Seigneur Jésus, qu’annoncent les anges, est la réalisation d’une promesse longtemps attendue, où Dieu affirme que la vie est plus forte que la mort, que le vivant, en commençant par le Christ, n’a pas sa place dans les tombeaux de ce monde, dans le tombeau de la mort.
Chacun et chacune de nous, nous sommes venus au Christ par des chemins tout aussi différents que nous le sommes les uns des autres. C’est une recherche commune qui nous unit et parce que nous croyons ensemble en Église, nous ne cessons d’approfondir le don que Dieu nous fait en Jésus Christ et nous ne cessons de nous en émerveiller. C’est tout le sens de cette grande veillée pascale.
Mais il y a bien des manières de s’attacher au Christ et si chacun et chacune de nous pouvait prendre la parole ce soir, nous serions émerveillés par la diversité de nos cheminements et de nos raisons de croire. Écoutons quelques témoignages .
« Si je suis ici ce soir, c’est que j’ai trouvé en Jésus un homme qui a vécu et parlé de la vie comme nul autre. Il se dégage une telle force dans sa manière de me montrer le chemin qui mène à Dieu, que je crois en sa parole. »
« Si je crois au Christ, c’est que le témoignage de sa vie s’est imposé à moi. Si la vie a un sens, si elle vaut la peine d’être vécue, c’est de donner sa vie comme Jésus l’a fait. Voilà ce qui me fait vivre, et, pour moi, il n’y a pas de plus grand maître sur cette route que le Seigneur Jésus. »
« Si je suis ici ce soir, c’est peut-être parce qu’à force de méditer les évangiles, et de tenter de les vivre dans mon quotidien, je me suis attaché à cet homme Jésus. Comme si tout à coup, cet inconnu de la Galilée, m’était devenu proche. À travers son message d’amour et de pardon, la vie de cet homme s’est mise à compter pour moi. Je me suis surprise à l’aimer, à être touchée par son combat, comme si sa lutte était devenue la mienne. »
« Si je crois au Christ, c’est qu’en cheminant avec des chrétiennes et des chrétiens, en approfondissant ma vie de prière, en me nourrissant des sacrements, Jésus est devenu une présence vivante en moi, dont je ne pourrais plus me passer. Comme si la foi en Jésus et en sa parole, me faisait vivre à mon tour ce qu’ont vécu tous ceux et celles qui l’ont suivi avant moi : ce sentiment d’être aimé par lui, accueilli avec mes rêves et le poids de mes faiblesses. »
« Si je suis ici ce soir, c’est qu’au cœur de l’épreuve et de la maladie, il était le seul en dernier lieu, vers qui je pouvais me tourner dans mon impuissance; et je n’ai pas été déçu. Mystérieusement, le Dieu de Jésus-Christ était au rendez-vous et dans ma prière j’ai trouvé la paix. En dépit de ma souffrance, j’ai trouvé le courage de porter ma croix avec lui. C’est pourquoi je crois en lui. »
Un philosophe grec (Héraclite) disait, il y a déjà 2, 500 ans : « Si tu ne sais pas espérer, tu ne pourras jamais accueillir l’inespéré. » En cette Sainte Vigile, qui est la mère de toutes les vigiles, de toutes les attentes au cœur de la vie des hommes, nous proclamons que l’inespéré s’est fait chair, que le Fils du Père a habité parmi nous et qu’il a vaincu la mort. La pierre qui retenait la vie a été roulée sur le côté. La vie qui était captive de la mort a été libérée de ses entraves. Et Jésus Christ est devenu notre éternel printemps.
Voilà la foi qui nous rassemble en cette nuit. À la suite de tous ceux et celles qui nous ont précédés dans la foi, nous faisons mémoire de ces trois femmes, à l’aube de ce matin de ce matin de Pâques à Jérusalem, où chantaient tous les matins du monde :
« Pourquoi cherchez vous le vivant parmi les morts ? Il n’est pas ici, il est ressuscité ! »
La Vie a pris la clé des champs ! Elle va d’ici, de là, se donnant à quiconque veut marcher librement à la suite de cet homme de Galilée, Jésus, Christ et Seigneur, le premier des vivants !
Réjouissons-nous frères et sœurs ! Célébrons ! Rendons grâce à Dieu en cette nuit sainte! Christ est ressuscité ! Il est vraiment ressuscité ! Amen !
Yves Bériault, o.p.
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