Homélie pour la fête de la Sainte Trinité

Un mystère ! C’est ainsi habituellement que l’on nous présente ce qui est le coeur de notre foi, la Sainte Trinité. Ce mystère d’un Dieu en trois personnes, bien des pères de l’Église et des mystiques ont tenté de l’expliquer en usant de métaphores de toutes sortes afin de le rendre intelligible.

Saint Grégoire de Nazianze, disait de la Trinité : « Le Père est la Source, son Verbe est le fleuve, l’Esprit Saint est le courant du fleuve. » Catherine de Sienne, elle, prenait l’analogie du Buisson ardent, le Père étant le feu, le Fils étant la lumière qui se dégage du feu, et l’Esprit Saint la chaleur du feu.

Mais l’exemple dont je garde le souvenir le plus frappant est celui de cette soirée chez mes parents. Nous étions assis au salon ensemble sur un divan. Ma mère était assise entre moi et mon père, heureuse de nous avoir tout près d’elle. Soudain, comme si elle venait de faire une grande découverte, elle s’exclama, en indiquant mon père : « Le père »; ensuite elle se tourna vers moi et dit : « le fils », et, se pointant du doigt, elle eût un moment d’hésitation, et elle dit avec un grand sourire : « et le Saint Esprit ». Ma mère ne parlait jamais de sa foi, et je me demande encore aujourd’hui comment lui est venue une telle idée ? C’était tout à fait spontané, et je garde le souvenir que ma mère venait d’exprimer là une profonde intuition du mystère de la Trinité, qui m’interpelle encore aujourd’hui.

Il n’est pas simple de parler de la Sainte Trinité, et pourtant, cette vérité de notre foi est fondamentale. Elle structure notre Credo, ainsi que toutes nos liturgies. Lorsque nous prions et célébrons ensemble, nous prions toujours le Père, par le Fils, dans le Saint Esprit. Notre foi est décidément trinitaire.

Pourtant, vous conviendrez avec moi qu’il serait tellement plus facile d’affirmer que nous croyons tout simplement en un Dieu, comme toutes les autres grandes religions. On éviterait ainsi beaucoup de querelles et de désaccords. Alors, pourquoi tenons-nous tellement à affirmer cette foi en la Sainte Trinité ?

Poser la question, c’est y répondre. Nous croyons au Dieu trinitaire parce que c’est lui qui nous a donné de le connaître. C’est lui qui s’est révélé à nous. Ce serait tellement plus simple s’il ne nous avait pas légué cet héritage en Jésus. Mais voilà, Jésus est venu, et il nous a dévoilé le vrai visage de Dieu. Et nous croyons que si Dieu est amour, c’est parce qu’il est Trinité.

De la même manière que les astrophysiciens ne cessent de s’émerveiller devant l’infini grandeur d’un univers, qui ne cesse de se complexifier et de s’étendre au fur et à mesure qu’ils le découvrent, la foi chrétienne est le résultat de cette découverte progressive du Dieu d’Abraham, d’Isaac, de Jacob, de Moïse et de tous les prophètes, et qui a atteint son point culminant, il y a deux milles ans, alors que Dieu est venu parmi nous, qu’il a pris un visage, et qu’il s’est fait connaître de nous comme un être de communion, en qui se vit une profonde intimité, un mystère d’amour inouï entre le Dieu Père qui envoie son Fils, le Dieu Fils qui est tout donnée à son Père, et qui vient pour nous ramener vers lui, et le Dieu Saint Esprit, qui est cet amour éternel qui uni le Père et le Fils. Ils sont trois, mais ils ne forment qu’un seul Dieu en trois personnes. On l’appelle la Sainte Trinité et c’est un mystère !

Dieu s’est révélé à nous comme un être infiniment plus complexe qu’on ne pouvait jamais l’imaginer, et cette révélation que Dieu fait de lui-même est fondamentale en ce qu’elle nous donne de connaître de notre propre nature humaine. Quand il est dit au livre de la Genèse que nous sommes créés à l’image de Dieu, cette révélation atteint de nouvelles profondeurs quand nous découvrons en Jésus que notre Dieu est un Dieu de communion, qu’il n’est pas « l’éternel célibataire des siècles », comme l’écrivain un philosophe. La Bible, et surtout le Nouveau Testament, nous révèlent qu’il existe un profond mystère d’unité et d’amour en Dieu, un amour fécond qui nous unit à Dieu, ainsi que les uns aux autres. Nous aussi nous sommes des êtres de communion, appelés à donner la vie. Il suffit de regarder la cellule familiale pour s’en convaincre.

La grandeur de Dieu, et ce qui le rend fascinant, c’est que c’est un Dieu qui veut se faire connaître de nous et qui prend l’initiative. Ce que la Révélation nous apprend, du livre de la Genèse jusqu’au dernier livre de la Bible, c’est qu’il est dans la nature même de Dieu de créer et d’appeler sa création à participer à sa gloire, à qui il est. 

C’est pourquoi au coeur de l’expérience chrétienne, afin de parvenir à entrer dans ce désir de Dieu de mettre en nous sa vie et sa joie, survient l’événement Jésus-Christ et son achèvement, qui est le don de l’Esprit Saint. Notre cœur est fait pour accueillir un tel don, car Dieu nous anime d’un mouvement intérieur, d’un désir qui est en nous l’écho de son propre Désir. 

Frères et soeurs, parce que nous mettons notre foi en Jésus-Christ, nous croyons et nous affirmons que Dieu n’est pas une invention, mais une découverte. Nous croyons que Dieu est une rencontre que chacun doit faire en soi-même. Nous croyons que Jésus-Christ est le chemin de cette rencontre, que le Père est celui qui nous appelle à la vie, et que cette vie habite en nous par le don de l’Esprit Saint.

Chaque dimanche, quand nous nous rassemblons, nous ne célébrons pas une idée abstraite, mais la vivante réalité de notre Dieu, qui est Père, Fils et Esprit Saint. Amen.

Yves Bériault, o.p. Dominicain

Une Réponse

  1. Juste méditer sur cette communion trinitaire donne joie et admiration, car elle a débordée jusqu’à nous, ces petits enfants.

Laissez un commentaire