Appelé à beaucoup voyager, me déplaçant de communauté en communauté, d’église en église, je suis un témoin privilégié si l’on peut dire de cette réalité qui saute aux yeux dans ce pays qui est le mien. Inutile d’énumérer ici les réalités que je côtoie et que vous connaissez tout aussi bien que moi. Il faudrait être aveugle pour ne pas voir. Mais aveugles aussi pour ne pas voir qu’au-delà de ces murs décrépits, de ces clochers qui chancellent, la réalité profonde qui continue de soutenir cet édifice de la foi qu’est l’Église et qui ne se réduit ni à un patrimoine immobilier ni au nombre de têtes chauves ou grises dans une assemblée.
Car il y a bel et bien le petit reste, un petit reste de tous âges étonnamment, des passionnés de l’Évangile, de l’Eucharistie, de la vie en communauté, du partage fraternel, de la présence attentive et généreuse auprès des plus pauvres. Petite armée de rien du tout qui avance vers l’avenir avec tellement peu de moyens qu’elle en est émouvante, et pourtant rien ne semble pouvoir la décourager ou l’arrêter. C’est ce petit reste que Dieu a aimé par le passé en Israël; c’est pourquoi il demeure redoutable, puisque c’est Dieu lui-même qui continue de l’accompagner et de veiller sur lui. Je ne puis que nous souhaiter d’appartenir à ce petit reste, mais cela demande un certain courage, ce que certains appelleraient même une grâce d’aveuglement. Mais pourquoi pas? Nous n’avons rien à perdre mais tout à gagner.
Comme l’écrivait avec justesse le pape François dans sa première encyclique Lumen fidei :
« La foi n’est pas un refuge pour ceux qui sont sans courage, mais un épanouissement de la vie. Elle fait découvrir un grand appel, qui est la vocation à l’amour, et elle assure que cet amour est fiable, qu’il vaut la peine de se livrer à lui, parce que son fondement se trouve dans la fidélité de Dieu, fidélité qui est plus forte que notre fragilité.»
fr. Yves Bériault, o.p. Dominicain.
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