Le papillon d’automne

automne

Ce matin, attiré par le soleil d’automne
et le coloris extraordinaire de cette saison en mon pays,
j’ai pris mes souliers de marche en direction de la montagne.

L’air sentait bon, feu de bois et feuilles séchées,
le tout emporté dans l’air frais du matin.

Derniers sursauts d’une saison
sur le point de céder la place
aux brises qui apportent le froid.

Sur ma route, j’ai croisé un papillon,
événement rarissime pour la saison.
Surpris, je l’ai vu s’élever soudainement devant moi,
avec une vigueur inhabituelle pour un papillon.

Il se débattait dans l’air frais du matin,
comme aspiré par cette lumière d’or réfléchie par les feuilles,
ou plutôt comme inspiré par cette lumière,
car il semblait danser avec l’énergie de celui qui sait
que le temps est compté.

Un petit papillon d’automne,
signe d’espérance et de détermination
sur la route d’un marcheur solitaire.

A sa manière, sans le savoir,
il me parlait de la suite du Christ

Saisi par la lumière du Christ ressuscité,
plus éblouissant qu’un milliard de soleils d’automne,
nous allons de-ci de-là,
emportés par le souffle de l’Esprit,
au gré des événements et des saisons.

Les jours qui passent,
lorsqu’ils baignent dans cette lumière,
ne font que raviver la foi de ceux qui croient,
car le temps est court et la moisson est grande, très grande !
Tant de défis à relever, tant d’amour à donner et à recevoir.

Il nous faut donc devenir papillon d’automne
sur tous ces chemins de par le monde
où se trouvent des promeneurs solitaires
qui cherchent un sens à la vie
au fil des saisons qui passent.

Voilà où nous entraîne l’admirable lumière du Christ :
au cœur de la vie !
Apprends donc à danser ta foi,
là où le souffle de l’Esprit te conduit.

Il n’y a pas de plus belle saison
dans la vie de celui qui croit au Fils de Dieu !

Yves Bériault, o.p.

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Fleurs séchées et papillons

A l’âge de sept ans mon enfance a connu un bouleversement sans précédent dans sa courte histoire. Après de « nombreuses » années d’aventures urbaines sur l’asphalte de Montréal, je déménageais avec ma famille dans une campagne promise au plus brillant avenir: celui de banlieue. Mes points de repères dans la vie allaient brusquement changer. Pendant quelques jours, au grand étonnement de mes parents, je restai assis sagement sur la galerie de la maison. Je n’osais pas m’aventurer dans cet univers inconnu et sûrement hostile. Peu à peu, cette campagne nouvellement conquise m’apprivoisa à son tour. Je découvris avec étonnement ses champs fleuris et ses boisés. Je les imaginais s’étendre jusqu’au bout du monde. Je venais de découvrir la forêt enchantée des étés de mon enfance. Avec mes nouveaux amis, compagnons d’infortune nouvellement arrivés dans cette banlieue en voie de devenir, je prenais peu à peu possession de mon royaume: fleurs séchées, chasse aux papillons, grenouilles et menées, « talles » de framboises sauvages, pommettes volées chez le fermier. Tout revêtait un air d’aventure lorsque de bon matin nous partions en excursion. Dans notre forêt, Robin des Bois et chevaliers, Tarzan, cow-boys et indiens se côtoyaient sans difficulté. Notre fermier bougon devenait notre shérif de Nottingham, et de château en château, de conquête en conquête, chaque jour notre imaginaire préparait les rêves de la nuit. Dans la forêt, le temps semblait immobile. Il nous façonnait avec une infinie délicatesse.

A l’automne, lorsque la rentrée inévitable se présenta, celle que ma petite tête d’enfant insouciant avait complètement oubliée, je n’étais plus tout à fait le même. Bien plus qu’une collection de souvenirs hétéroclites et d’aventures loufoques, l’été qui s’achevait laissait en moi son empreinte. Nous étions complices. Je rentrai à l’école un peu nostalgique avec mon baluchon de souvenirs, alors que je tombais sous la férule des règles grammaticales et des mathématiques. Plus de doute possible, l’été était bel et bien terminé.

Pourtant il continuait à nourrir mes rêves éveillés, mon goût de l’aventure et de la découverte. Il m’apprenait à espérer. Depuis, année après année, je l’ai toujours attendu avec hâte et fébrilité, comme un ami fidèle. Avec le temps, j’ai compris que l’été était un grand éducateur, un maître insurpassable avec ses fleurs sauvages, ses ouaouarons et ses papillons éphémères. Plus qu’aucune autre saison, l’été m’a préparé à la vie. J’ai toujours aimé aller à son école.